Ce n'est pas vraiment une révélation, mais c'est le genre de constat qui vous tombe sur le bord du crâne sans prévenir : je suis une mauvaise influence. Pour le peu d'influence que j'ai, en tout cas, elle est bien mauvaise. Des gens utilisent mes articles pour faire la promotion de leurs ventes de produits pour adultes, de gentils lecteurs n'auraient jamais été traumatisés par Shintaisou si je n'en avais pas parlé (même pour dire de ne pas le mater, quelle ironie), et je connais des joueurs qui ont acheté Steel Battalion par mon intermédiaire. On a beau souhaiter que le monde devienne un endroit un peu plus vivable, on ne fait pas grand-chose pour le changer - enfin si, acheter du riz altermondialiste, mais bon.
Il faut dire qu'à l'origine, l'éditotaku en particulier et raton-laveur.net en plus large n'est pas vraiment parti d'un bon sentiment : il est né en réaction au vide intellectuel du Net francophone sur les animes et les jeux vidéo. Et je dis bien "Net", pas "blogosphère" ; à l'époque, les blogs français faisaient caca dans leurs couches. Plus de cinq ans se sont écoulés depuis que j'ai acheté ce nom de domaine, et je vais finir par croire que le Net français est sérieusement incontinent tellement les choses ont peu évolué.

En France, pendant les années 80, on a eu le Clob Dorothée : le phénomène de la japanime a été très largement mis sur le devant de la scène médiatique, et les petits otakus en devenir vivaient dans leur bulle. Quand cette dernière a éclaté et que l'hiver fut venu, ils se retrouvèrent fort dépourvus. Actuellement, le Net français a le skyblog, et l'histoire se répète : abrutis vivant dans leur bulle pendant qu'ils sont les chouchous des médias. Et purée, quand les skyblogueurs passeront la puberté, qu'ils tenteront de se trouver un job et que leur employeur les enverra chier à l'entretien d'embauche en hurlant de rire parce qu'il a retrouvé leurs écrits après une recherche Google, ce jour-là, je vous garantis que je serai allongé sur mon transat avec un paquet de pop-corn pour les regarder tomber du ciel.
En attendant (depuis cinq ans, quand même), la situation ne bouge pas : le terme de "blog" est si insultant que je me refuse à dénommer ainsi l'éditotaku, la moyenne du QI des sites web francophones anime et JV approche le zéro absolu - et si jamais il existe des lieux de qualité régulièrement mis à jour, ce sont des îlots perdus dans un océan de connerie. J'insiste sur "régulièrement mis à jour" : c'est dingue de voir comment un site peut tomber en friche le jour où ses admins décident d'ouvrir un forum, dont la fréquentation et la modération finissent par complètement prendre le pas sur le contenu rédactionnel.

Bis repetita : Le web français sur les jeux vidéo et la japanime ne mûrit pas : il reste coincé entre des voleurs attardés mentaux et des skyblogueurs qui se prennent pour la révolution culturelle du web. Qu'est-ce qu'on en a à foutre ? Facile : dans le monde réel, celui de la télévision, des journaux et de l'économie de marché, les mangas et les jeux vidéo commencent à avoir un sérieux poids culturel et financier. Il y a régulièrement des mangas qui trustent les listes des livres les plus vendus en France ; des chaînes de télé sont en train de reléguer le traumatisme Dorothée au passé et diffusent des séries de qualité ; et pour la culture, l'influence nipponne sur nos existences de petits occidentaux sera sérieusement analysée dans quelques décennies par des sociologues étudiant la pop culture. Dans l'immédiat, il en va de la réputation de ces passions et des fans - nous, quoi. Vous les aimez, vous, ces reportages à la con qui nous représentent comme des rebuts de la société ? A chaque fois qu'un reporter en manque de contenu fait une recherche Google pour arrondir ses fins de mois et à chaque fois qu'il tombe sur un skyblog ou ces sites qui mettent une moyenne de 10 sur 10 à tous les animes de la création, c'est une feuille de chou qui paraît et une chance de légitimer notre passion qui disparaît. Surtout que comme je l'ai déjà écrit plus haut, des sites de qualité en français, je pourrais citer ceux que je connais sur les doigts d'une seule main.
Il faudrait une impulsion pour sortir de cette situation. Comme disait Raymond Barre cité par Coluche, "il faut mettre un frein à l'immobilisme". Pour ça, il faudrait que les gros bonnets s'y mettent et se décident à chercher les sites de qualité... Sauf qu'apparemment, ils ont autre chose à faire. Je viens de mettre un lien vers animeka (il paraît qu'ils lisent ce site, coucou les mecs !), mais les administrateurs se sont enlisés dans le débat de la présence des fansubs sur le site. Donc, ils ont autre chose à foutre. Et mine de rien, c'est super ambitieux et prétentieux ce que j'ai écrit là, "se mettre à chercher les sites de qualité"...

... donc on va tenter de commencer petit. Et même si ça me fait mal aux seins, je pense aux blogs. Au fond, le blog, ça reste un site avec une interface simplifiée pour éditer et publier ses articles - c'est ainsi que je vois ce concept, puisque j'ai commencé à m'en servir par flemmardise d'uploader des fichiers HTML et de faire les liens à la main. Le blog, avec un bon écrivain qui sait rester réactif en proposant régulièrement du nouveau contenu, ça dépasse largement les sites web qui oublient d'ajouter quelque chose parce que leur forum leur prend trop de temps. Essayons déjà de trouver les blogs ou sites français qui n'ont pas lâché l'affaire après deux semaines et qui n'écrivent pas une fois par mois. Parce que perso, je commence à en avoir ras la casquette qu'on me dise "tiens, voilà un super article que tu devrais lire" avant de voir que c'est systématiquement en anglais. J'ai pas de problème avec cette langue, mais merde, pourquoi c'est jamais en français ?
D'ailleurs, les anglais ont récemment réalisé que leur blogosphère japanime tournait en rond : à force de faire des articles à base de captures d'écran-synopsis détaillé de l'épisode-avis perso sur trois lignes, on ne va pas bien loin, fit remarquer l'auteur ricain de blogsuki, un annuaire de blogs sur les animes. Le problème, c'est que les quelques français qui n'écrivent pas en SMS ont suivi la tendance...
Pour ceux qui tomberaient sur ce site par hasard en se demandant comment j'opère puisque j'ai l'air si malin que ça, je les invite à lire le dernier article assez conséquent paru ici sur une série. Je sais pas moi, regardez celui sur Densha Otoko, il résume assez bien la ligne rédactionnelle : un résumé qui se réduit au strict minimum, beaucoup de liens débiles, un avis personnel ou une analyse assez maousse. Si j'ai bien travaillé, mes copains de chez Kanpai-Net s'en inspirent pour faire leur article à eux et on recommence avec autre chose. Et c'est une habitude purement personnelle, mais peu ou prou de smileys ; si votre humour est si mauvais ou si mal écrit qu'on n'arrive pas à comprendre que vous êtes en train de faire le clown, vous feriez mieux de réécrire votre prose au lieu de la gaver de (\^_^/).



Ce texte devient franchement trop long, alors je vais résumer et boucler :
- L'internet français sur les animes et les jeux vidéo était à chier et il est toujours à chier ;
- Entourés de médiocrité, les bons sites ou auteurs francophones sont devenus introuvables. Pire, en l'absence de toute mise en relation, ils s'ignorent les uns les autres ;
- il faut mettre un terme à cela ou tout ce que nous verrons en français pour le restant de nos jours sur le Net sera un brouet de scantrads faits par des Kevins et des pseudo-fans éternellement satisfaits par les mêmes bouses yuri-guro-shonen-moe-ecchi-harem qui y mettront 10 sur 10 chez AnimeKa ;
- mettre en relation les bons blogs et sites vivants entre eux pour initier une blogosphère ou un annuaire correct.
- A partir de là, on va enfin pouvoir avoir un peu de lecture correcte --> victory.
- projet pour la suite : domination du monde francophone.



Dans l'immédiat, voilà ce que tonton raton peut faire : si vous avez ou connaissez un site web ou un blog qui rentre dans vos critères de qualité, pensez à en parler dans les commentaires ci-dessous et présentez votre cuisine. N'oubliez pas que vous pouvez aisément ajouter un lien avec la case prévue à cet effet. Vous ne survivrez pas tout seul dans votre coin, et jusqu'à preuve du contraire, on écrit pour être lu. En attendant d'établir meilleur quartier général que ce billet qui tient encore de la note d'intention, Skav a codé Blogchan, qui est un blogsuki à la française (et il compte déjà refaire le système de notations d'AnimeKa, hu hu), mais il suffit déjà de vous faire connaître auprès de ce site - en attendant que d'autres nous rejoignent dans cette "impulsion" dont je parlais plus haut. Ben oui, si cette idée vous plaît, autant en parler de votre côté. Yay pour vous.