Oui bon, c'est pas ma faute s'ils ont fait un titre aussi générique. Le bouquin est sous-titré "Le Japon vu par 17 auteurs", et publié chez le plus schizophrène des éditeurs de ce côté du Mississipi, j'ai nommé Casterman. En effet, j'ai jamais compris leur politique vis-à-vis du manga : une partie sort dans la collection "Ecritures" qui regroupe des oeuvres assez éclectiques, et une autre tranche sort chez leur branche Sakka, qui remplace la désastreuse collection "Casterman Manga" (merci pour les traductions depuis l'anglais et les éditions en lecture occidentale). Je n'ai aucune idée de leur politique pour décider si tel ou tel manga est publié sous "Ecritures" ou sous "Sakka", et quand j'essaie d'y réfléchir, mes oreilles se mettent à saigner. Tenez, ils viennent de sortir un Jirô Taniguchi, auteur habituellement classé dans "Ecritures" (et plus connu en France qu'au Japon, un peu comme Adamo dans l'autre sens mais en mieux quand même), sous le label Sakka.

Japon, donc. Le concept n'est pas neuf, mais il a le mérite d'avoir été mis en oeuvre par le super-méga-cool Frédéric Boilet, le monsieur Manga de Casterman dont les choix éditoriaux sont plus que très super-méga-compétents. Il s'agit donc d'un recueil collectif d'auteurs japonais et français assez large : il y a des grosses pointures comme Joann Sfar (Le Chat du Rabbin, lisez-le si c'est pas déjà fait !), Benoît Peeters (son Monde d'Hergé est une incroyable redécouverte de Tintin) ou Moyoko Anno (oui, je prends le parti de penser que tout le monde a lu Happy Mania... me regardez pas comme ça, vous me rappelez mes passages à la caisse dans les mangathèques), mais il y a également pas mal d'auteurs inconnus des non-bédéphiles au dernier degré. Les fromages qui puent ont été conviés au pays du Soleil Levant par M. Boilet où chacun a dessiné ses pages comme un carnet de voyage ou son empreinte du pays, et les autochtones se sont plus largement lâchés sur leur propre pays (ou certains, comme Little Fish, qui se sont carrément tapés un délire). Pour la qualité, ça s'en ressent : autant certaines tranches de vie sont d'une émotion hypnotique, autant d'autres laissent relativement indifférent... Enfin bon, dans l'ensemble, c'est quand même un fort bel ouvrage. Et surtout, il y a une planche de Joann Sfar qui est tellement géniale que je fais jouer mon droit à la citation et mon scanner pour vous la faire partager. Dans sa participation au livre, M. Sfar laisse parler son copain-qui-vit-au-Japon (celui avec les lunettes, l'auteur s'étant représenté en crocodile), et la page qui suit est son avis sur les jeunes qui passent à l'Institut Franco-Japonais :



Oui, j'aurais pu vous montrer une autre page plus poétique ou belle, mais... auriez-vous déjà oublié quel site vous êtes en train de lire ?