Un gros article dans le Bodoï (le magazine qui parle de dessins français avec des filles et des grosses bulles sur la couverture qui ne sont pas pleines de texte) de ce mois-ci sur l'avenir de la bédé franco-belge, c'est gravement titré (“BD 2004, jusqu'ici tout va bien...”) et c'est à lire. Ou alors, c'est le résumé qui suit - et les discussions sans fin qui vont brûler sur le Net - qui sont à lire.

Au menu: le marché franco-belge est complètement saturé et les libraires sont complètement débordés, les éditeurs ne savent plus s'ils vendent de l'art ou de l'industrie, le rythme de parution au compte-gouttes finit par user le lectorat jeune (l'ex-directeur de Casterman parle carrément de la BD “risquant de devenir une lecture de troisième âge”!) qui passe au manga. Du coup, tous les éditeurs s'y mettent, surchargent encore les catalogues et les étagères des marchands et encore moins de production maison se vend.
Le chiffre qui tue pour l'année passée: augmentation des ventes de franco-belge: 2%, alors que jusqu'ici “la croissance était à deux chiffres”. Augmentation des ventes de mangas: +75%. Le pédégé de Kana (groupe Dargaud), interviewé dans ce dossier, ajoute que son volume de ventes a grimpé de 40% et que Kana fait maintenant 20% du CA de Dargaud. Ouille.
Faut dire que dans la crise actuelle, Bodoï craint que beaucoup de petits éditeurs restent sur le carreau. Et que les gros arrivent à tenir le coup grâce à leurs antennes mangas - surtout pour Glénat, mais ça c'est pas nouveau.

En fait, tout ça a fini de me convaincre sur quelque chose: le racisme élitiste bête et méchant des lecteurs de franco-belge dont je parlais précédemment se réduit comme une peau de chagrin. Okay, c'est le même Bodoï qui a récemment sucré sa page consacrée aux mangas, mais le phénomène semble vraiment se réduire aux vieux de la vieille et aux jeunes éduqués dans l'intégrisme de leurs guides. Enfin, quand je dis “intégrisme”, je sais pas s'ils sont sur le point de se faire sauter avec une ceinture d'explosifs au milieu d'une convention de Japanime, mais si la crise franco-belge continue, ça tardera pas à être le cas. Et ça, je sais pas s'il faut s'en réjouir ou le déplorer...