Par neuro, bien content d'avoir trouvé un endroit où publier ça. Merci Raton !

Ça m'a fait ça la première fois dans les années 90. À l'époque, mes parents m'octroyaient une rente mensuelle de 500 francs afin que j'acquière des ouvragesen rapport plus ou moins lointain avec mon domaine d'études, plus... un bouquin de science fiction, fantasy ou autre domaine fantastique que ma chère maman ne manquait pas de m'emprunter sitôt lu, pour s'écrier peu après dans un râle d'agonie propre à faire passer ne horde de zombis glaireux pour les petites filles modèles "rhaaaaaaa mais quand est-ce que j'aurai la suite ?". Un ouvrage par mois, cela signifie qu'il m'a fallu 10 mois pour lire les Chants de la Belgariade et de la Mallorée, sans compter les petits à côtés, pas dénués d'intérêt, mais qui auraient mérité un peu plus de consistance. 10 mois à suivre avec passion les aventures aventureuses de nos aventureux aventuriers, à frissonner, trembler...

Et à la fin me direz-vous ? Eh bien à la fin, une couverture de couleur grise, en carton souple, affichant crânement le résumé du volume en cours et une courte biographie de l'auteur. Mais non ducon, c'est pas ça qu'on te demande !. Ah oui, c'est vrai.

Eh bien à la fin, un profond sentiment de solitude. En refermant le dernier volume, j'ai été envahi d'une sensation de vide intense, de manque profond, comme si je venais de quitter des amis avec la certitude de ne plus les voir. La fin d'une époque, quand, envahi par une indicible nostalgie et un gros coup de cafard à la clé.

Ça me l'a refait avec la sortie française d'Hikaru No Go. Cet excellent manga que j'avais auparavant lu en scantrad au fur et à mesure de sa sortie au Japon a rythmé mon existence durant pas loin de 48 mois, à raison de 23 tomes et d'une sortie tous les deux mois. 4 ans à me rendre périodiquement chez mon libraire favori, les yeux brillants, la truffe humide et les mains presque tremblantes pour lui demander avec anxiété "avez-vous le Hikaru No Go numéro [insérez un numéro entre 1 et 23 ici]", pour m'entendre souvent répondre "Désolé monsieur, il est en retard". 48 mois à voir Hikaru grandir, et moi avec. Ma vie qui évolue parfois lentement, parfois vite, entre la naissance de mon fils et la fin de mes études, et l'impression de faire un bout de chemin avec un ami, avant de le quitter un beau jour. Foule de souvenirs qui se bousculent dans ma tête, et que je conserve soigneusement une étagère de ma chambre, entre les albums photos de mes ex et un doujin acheté en convention. Mais plus rien de neuf, la certitude de ne plus jamais le voir. Un bout de ma vie qui s'arrête, et moi qui continue.

Pourquoi je vous parle de ça ? Parce que je viens de terminer une autre série. Un shoujo, cette fois, et plus précisément Fruit Basket.

Fruit Basket, pour résumer, c'est le meilleur manga que j'aie jamais lu, et qui a réussi l'exploit de déloger Hikaru de son piédestal, 22 volumes d'émotion pure, un manga très profond, beaucoup plus que ce que les premiers volumes laissaient imaginer. Des personnages humains, variés, et fouillés (Saki trop la classe, non pas celle là), un dessin superbe, et pour moi, la certitude d'avoir les larmezozieux au moins tous les 60 jours. Sans compter les relectures pour bien saisir tous les tenants et les aboutissants d'une histoire finalement assez complexe tant les liens qui unissent les personnages sont denses.

La fin de Furuba m'a fait d'autant plus mal que Natsuki Takaya a du boucler toutes les histoires dans les deux derniers volumes, et l'ambiance "fin d'une époque" s'en ressent encore plus. Même si la fin peut paraître logique du point de vue de l'évolution globale de l'histoire, je l'ai trouvée un peu décevante vue l'intensité globale de l'histoire ; je me serais attendu à "autre chose" (no spoil), ou peut-être à ça en fait. Lecteurs français, savourez bien votre chance, il ne vous reste que 3 volumes de ce bonheur en barre qu'est Fruit Basket. Et note aux éditeurs qui pourraient me lire : j'ai les 19 premiers volumes en ma possession, dépêchez vous de sortir les 3 derniers que je puisse effacer mes scans et rentrer dans la légalité, merci.

Quant à moi, il ne me reste que cette sensation amère de voir partir ces personnages que je voudrais retenir encore un peu, mais dont la main glisse, lâche la mienne, et dont l'image se brouille et finit par disparaître dans un pathétique fondu au blanc.