D'accord, d'accord, je vous l'accorde... Si Duke3D n'avait jamais existé, la première chose c'est qu'on se serait fait chier pendant quelques années. Ou alors on aurait joué davantage à Bad Mojo, sorti au même moment.
Et aussi, on aurait dû attendre un bout de temps avant d'avoir une interactivité avec les niveaux aussi poussée... Car c'est là que le Duke innova. Pas besoin de faire une phrase pleine d'exemples pour illustrer la déclaration de la ligne précédente parce que ça servirait à rien quand on parle d'un jeu culte.
Et donc, si Duke n'avait pas vu le jour... Des jeux comme
Postal 2 seraient considérés comme normaux. On trouverait normal d'avoir une interactivité aussi faible avec le décor.

Ne parlons pas de la violence du jeu, d'autres le feront pour nous. Parlons du jeu lui-même!
Nous disions donc, aucune interactivité. Aucun interrupteur, les portes s'ouvrent toutes seules sur notre passage, on ne peut rien utiliser, on ne peut pas parler aux gens, il n'y a pas de passages secrets, et c'est à peine si on peut casser les vitres ou prendre les armes des morts. Les seules discussions sont celles prévues par le scénario et nos actions aucune influence sur le long terme de la partie ou sur le scénario.
On le sait déjà, Postal 2 (ou Postal² d'après le readme) est un défouloir, rien de plus. On se promène dans un bled paumé en faisant ses courses pour une brique de lait ou un arbre de Noël et on fait ce qu'on veut. On entre dans les maisons des gens paniqués ou énervés de nous voir débarquer, on décapite les passants avec une pelle Bernie style, on sodomise un chat avec le canon du fusil à pompe pour faire un silencieux, on déverse une trainée d'essence dans les couloirs de la supérette pour y foutre le feu, ne pas avoir à attendre son tour dans la file d'attente et voir les gens calcinés se recroqueviller et trembler sans mourir pour autant, on balance des coups de pied dans les cadavres pour les ballader dans la rue ou jouer au foot avec leur tête, on écrit une longue phrase pleine d'exemples, on élimine les manifestants anti-jeux-vidéo-violents ou anti-livres.
Puis on avance vers la zone suivante et hop, tout est oublié, les filcs n'ont plus envie de vous poursuivre après 5 minutes, les gens ont ressucité et les medikits sont réapparus. Alors on recommence.

Voilà, c'est tout. Le jeu est un défouloir avoué, dont le seul objectif est de nous faire passer un moment où l'on fait ce que l'on veut et où les conséquences sont limitées à un temps de 5 minutes maxi. Si on ne fait rien de violent, le jeu est chiant comme la pluie. Si on fait le psychopathe - et c'est ce qui est attendu - on s'amuse autant que n'importe quel doom-like, même si ce doom-like a 7 ans d'âge et qu'il s'appelle Duke Nukem 3D.

Techniquement, j'ai eu du mal à croire que le moteur d'UT2K3 était dans les coulisses. Les modèles 3D sont égaux en tous points à ceux de SoF2 , pareil pour les armes ou la physique des corps. Mais voilà, SoF2 a un an déjà.
Le level design est à chier. Bon, je suis sévère: il est tout juste passable. Les niveaux sont un minimum syndical en matière de détails: les mêmes textures partout, rien sur les murs, rien sur le sol - le summum du néant artistique et architectural est atteint avec la gallerie marchande. Certains niveaux ne ressemblent à rien, comme l'intérieur de l'église: c'est pas compliqué, c'est un looong couloir avec un confessionnal au bout et une grande salle avec plein de bancs à côté. Aucun sens du détail apporté aux décors.

Franchement, voilà les deux énormes défauts de Postal 2: un monde relativement terne et une interactivité minimum. Quand on veut faire un défouloir grandeur nature dans une petite ville, au moins on essaie de bien le faire. Qu'il n'y ait pas de scénario, de but ou de conséquences de nos actions, on s'en fout si on garde en tête que le jeu existe juste pour nous faire oublier une sale journée. Mais si on n'y croit pas, même pour un jeu vidéo, s'il n'est pas au moins l'égal de ses pairs dans le domaine de la suspension de non-croyance (“suspension of disbelief”, jargon check n°5 sur cette page), ça sert à rien.

En fait, voici les frères (jumeaux?) de Postal 2: Redneck Rampage et Kingpin. L'un nous propose également de faire les idiots dans un village du fin fond des USA en maltraitant les voisins, les animaux ou même les extra-terrestres: on peut visiter l'asile de fous, le cimetière, le manoir du coin... Tout pareil que Postal, sauf que Redneck Rampage a 5 ans et tourne sur le moteur de Duke3D. Kingpin (moteur de Quake 2) est un défouloir sur scénario dans les pires quartiers d'une grande ville US, avec les dealers de drogue et les toilettes pas propres. De là, Postal tire ses objectifs cousus de fil blanc, autant d'arguments pour errer sans but réel.

Au final, pas besoin de maintenir le suspense: est-ce que je recommande Postal 2? Avec le plein tarif, fuck no. Au tarif occase, difficilement: ou alors la collection budget qui sera dispo dans un an, comme il est de coutume avec tous les jeux PC où il est pas écrit Blizzard sur la boîte. Au minimum, téléchargez la démo et profitez-en comme d'un mod amateur pour UT2K3, c'est toujours un moment sympa à passer. Et tapez Set Gamestate Demotime 9999 dans la console pour désactiver la limite de temps de cette démo ;) .

Addendum