Quand je ne suis pas en train de sniffer... des paquets en provenance d'une carte réseau pour trouver dans quel bureau se cache la vicieuse qui trompe son mari sur MSN Messenger, je justifie mon gâchis d'oxygène sur Terre en disant aux étrangers qui me parlent que je suis éditorialiste. En fait, je dis "journaliste", parce que personne ne voit à quoi ressemble un éditorialiste au boulot. Même pas moi. Ces deux mots ne sont-ils pas synonymes ? J'en sais rien. Bref. L'hiver dernier, les confrères journaleux ont eu l'occasion de se grouper comme un seul homme, forcément puceau et acnéique, devant une cause commune. A savoir, l'éjection du rédac' chef de Gamespot.com, supposément après une critique massacrant Kane & Lynch Dead Men, jeu sponsorisé sur le site au moment des faits. Etrangement, toutes les critiques qui ont suivi se sont alignées sur la note de Gamespot, probablement par solidarité. Ces gens-là connaissent leur boulot.


Canard PC : Quand trois pages ne suffisent pas, écrivons des conneries.


Vous le savez déjà à la lecture des Tiers-Beta : j'aime les jeux de série B. Et X aussi, mais c'est une autre histoire. Bref, quand Steam a mis en vente un gros paquet de jeux Eidos, composé à 70% de merde pure, je ne pouvais pas dire non ! Youpi, Project Snowblind, si sympa sur Xbox, et si incompatible avec les écrans larges ! Oh, Conflict Denied Ops, où un test de la démo en coop avec Poshu nous a conduit à une séance de lacération mutuelle pour tout oublier ! Battlestations Midway, qui configure mon pad Xbox 360 en oubliant la touche pour tirer ! Deus Ex Invisible War, dont la présence dans ma logithèque Xbox suffit à invalider la qualité de toute mon étagère ! Ohhh, Kane & Lynch, le nouveau jeu si controversé de IO Interactive, les gentils gens qui ont fait les si agréables Hitman ! Je dois y jouer !

A peine six heures plus tard, voilà le jeu bouclé avec toutes les fins. Et une révélation : Kane and Lynch méritait ses notes lapidaires. Quelle déception de la part d'IO Interactive. Hmmm, non, barrez ça. Disons plutôt : quelle évidence de la part d'Eidos. Le jeu est un ratage, mais je suis intimement persuadé que c'est la faute à l'éditeur, qui est habitué à sortir des jeux non terminés mais qui ont la vertu de ne pas planter. Tomb Raider Legend qui n'a pas de fin, Conflict Denied Ops, n'en parlons pas, Age of Conan, Mdt nous parle régulièrement de la couche hallucinante de bugs...


Canard PC : Parce qu'un jeu qui plante toutes les 10 minutes (mais testé en trois pages) a toujours du potentiel.


Je me souviens d'une citation exemplaire de la part d'un ponte d'Eidos au sujet de Daikatana, qui supervisa la fin du développement pour que le jeu sorte un jour : "Il y a de la merde et du retard, et nous ne voulons pas avoir les deux". Le résultat fut abordé sur l'éditotaku en 2003, et vous feriez mieux de ne pas lire cela. Je pense sincèrement que c'est le leitmotiv d'Eidos pour tous ses produits : plutôt que de le sortir en retard, autant le sortir dès qu'il ne plante plus. On a un produit vendable, à défaut d'être peaufiné ou même bon.

Compte tenu du potentiel d'IO Interactive, K&L méritait un an de développement en plus. On voit énormément d'idées commencées, mais aucune ne se termine - pas même le scénario. Pour le gameplay, c'est simple : il n'est tout simplement pas fun. Exemple représentatif : à un moment, on est pris d'assaut par plusieurs tanks et un hélicoptère, avec une flopée de lance-roquettes devant nous. On commence à se dire que ça va chier, et même pas. Chaque décès, chaque élimination est hygiénique : au lieu de voir une explosion, on a l'impression que le pilote du tank vient d'éternuer. On peut s'évader d'une prison avec des dizaines de prisonniers courant dans tous les sens, mais sans la moindre impression de grand bordel. Comme des références cinématographiques avec le spectacle en moins. Au début du jeu, Kane organise un hold-up dans une banque pour voler le contenu de son propre coffre dans la chambre forte, absurdité relevée par son partenaire. Mais la banque tout entière est une absurdité architecturale, où l'on accède directement au coffre en passant par le parking. J'en arrivais à trouver comme avantage au jeu que pour une fois, on a des gunfights sans ennemis sortant à l'infini d'une porte !

De même, le scénario lie Kane, un efficace malfrat, à Lynch, un déséquilibré psychopathe. Sur le papier, ça semble génial, comme un buddy movie qui tourne mal. D'ailleurs, je n'arrive pas à trouver de film avec un scénario similaire, mais j'ai la flemme de chercher. Au début, ça donne droit à d'excellentes scènes : Lynch qui descend un otage alors qu'il "visait ses jambes", Lynch qui envoie chier Kane parce qu'il pique une crise de paranoïa, Lynch qui est à court de médicaments... Sauf que très rapidement, Lynch finit par se comporter comme une intelligence parfaitement artificielle. Certes, il ne reste pas coincé dans un mur et répond au doigt et à l'oeil. C'est peut-être là le problème, remarque : tout est oublié, parce que ça devait être fait mais que papa Eidos il voulait que le jeu il sorte à Noël. Tant pis si tout le principe tourne autour d'un duo (pas si) dynamique et que le coop online est absent par manque de temps de développement. Tant pis si toutes les fins durent - en cumulé - moins d'une minute, ce qui est dur à avaler quand l'histoire se veut dramatique et recherchée. Tant pis si le système de couverture derrière les éléments du décor se déclenche sans intervention du joueur et pas toujours avec une grande précision ("mais chuis derrière une caisse, planque-toi au lieu de te faire canarder !"). Tant pis.

Tant pis.

Quel gâchis.



Pendant qu'on parle de Steam : nombre de gens dans [editotaku] ont toujours des licences de Half-Life² en trop après avoir acquis l'Orange Box. Si vous n'avez pas l'intention d'acheter cette dernière mais que vous voulez avoir gratos votre propre HL², passez pendant la session IRC et on vous refilera ça. Comme chaque dimanche dès 21 heures, c'est sur #editotaku@irc.worldnet.net. Apportez vos mouchoirs parce qu'au même moment, Nolife diffusera l'intégrale de Gunbuster.