Episodes précédents : Tabula Rasa, Newsletter de Metin2, Trickster Online, RF Online, Auto Assault, Lord of the Rings Online, Vanguard: Saga of Heroes (seconde partie), Vanguard: Saga of Heroes (première partie), Archlord, Lineage II, Lineage II - Interlude, Dark Age of Camelot, Saga of Ryzom, Neocron, Planetside, Shadowbane, Face of Mankind. Un jour, j'aurai un système de tags pour que les lecteurs des anciens épisodes puissent trouver les plus récents. Un jour.



Donc, ouais. Fury (?), un MMO (??) australien (???), est resté environ un mois dans les boutiques avant de devenir gratuit et déposer le bilan. Le record de trois mois avant gratuisation, détenu jusqu'alors par le calamiteux Archlord, est explosé. Notons par ailleurs que pour feu Auto Assault, le studio NetDevil avait écarté cette possibilité, arguant que le programme n'avait pas été architecturé pour du "free to play" ; on peut croire que Fury y a été préparé...

Quoique. Le studio Auran semble oublier la pierre angulaire du business model d'un jeu gratuit : il faut que le produit de base soit d'excellente qualité. Je passe mon temps à le rappeler dans le Tiers-Beta ! Avec un jeu à abonnement, il faut convaincre le joueur de rester : il paie déjà un pécule à l'entrée et tous les mois, alors il faut l'encourager à continuer, en lui distribuant de nouveaux contenus et en valorisant son investissement en temps. Mais avec un jeu basique gratuit et au contenu optionnel payant, il faut convaincre le joueur de payer : certes, le produit initial est amusant, mais pour avoir un bon personnage, il faut soit jouer 25 heures par jour, soit payer quelques sous pour obtenir immédiatement un truc cool.
Il faut doser la frustration : que ça reste jouable sans payer tout en faisant miroiter combien c'est mieux après un petit investissement de temps à autres. Mais cela implique qu'il soit déjà en train de jouer ! Dans un jeu à abonnement, il faut souvent acheter la boite : l'éditeur s'y retrouve déjà, même si vous ne continuez pas. Hé oui, même Vivendi l'avoue lui-même dans son communiqué de presse annonçant la digestion d'Activision : ils parlent de "jeux en ligne sur abonnement à forte marge"... Faut pas se leurrer : les MMO sont si populaires chez les éditeurs parce qu'ils sont facilement et rapidement profitables. Pour convaincre d'acheter cette foutue boite, le marketing suffit. Mais pour un jeu gratuit, après un petit téléchargement, on a immédiatement affaire au produit complet, qui se doit d'être sans le moindre pli. C'est ça que les auteurs de Fury n'ont pas compris.

Bien sûr, je pourrais faire mon journaleux total de merde en racontant que voilà, c'est le dur monde des jeux massivement multijoueur, vous comprenez ma bonne dame, l'innovation agonise face à la sécurité quand on veut se mesurer à World of Warcraft. Mais je ne peux pas, puisque 1) j'ai joué à la beta qui était si pitoyable que je n'ai jamais écrit d'article dessus et que le dossier de captures d'écran dort encore sur mon disque dur (mais on va s'en servir pour ce texte), et 2) tous les journaleux totaux de merde qui le dénomment "MMO" n'y ont pas joué, vu qu'il n'est aussi "massivement multijoueur" que ma grand-mère est skateboardeuse.
Je pourrais aussi écrire qu'il y avait du potentiel pour un produit axé PVP et carrément pas massivement multijoueur en fait, puisque son gameplay se rapprochait davantage de Guild Wars en combat d'arènes. Mais là encore, pas possible - cf point n°1 au-dessus. Et en fait, c'est carrément le PVP de Guild Wars du clodo tellement c'est repompé.
Je pourrais aussi rappeler qu'il s'agit d'un des premiers jeux de l'éditeur indépendant Gamecock, fondé par des programmeurs qui souhaitent s'affranchir des grands méchants loups de la distribution qui cassent tous leurs jeux. D'un coté, ce sont les mêmes qui avaient tenté il y a quelques années un projet similaire, Gathering of Developers, éditeur des Hidden & Dangerous, Mafia ou Serious Sam (le prochain jeu de la Croteam sortira d'ailleurs chez Gamecock), finalement avalé par Take-Two. De l'autre, ce sont également les gens de Gamecock qui ont foutu le bordel la semaine dernière aux Video Game Awards : ils sont montés sur scène, gueulards et habillés en poulets, interrompant le discours de Ken Levine, dont Bioshock venait de gagner le titre de "Meilleur jeu de l'année". Voyez que le pamphlet sur l'éditeur, par contre, je ne m'en prive pas.



Fury était tout simplement atroce. Graphismes hideux, colorimétrie foireuse, son imbuvable. Toutes les captures d'écran de l'éditeur étaient photoshoppées à mort. En fait, j'ose carrément affirmer que ce produit n'avait pas une qualité de niveau professionnel et tenait davantage du prototype d'étudiants.



Ca tournait avec l'Unreal Engine 3 (!²), mais il n'y avait aucun effet de parallaxe pour le ciel - juste une coupole maladroite en 3D que l'on voyait en levant le nez.



Je n'ai même pas pu faire de capture d'écran de la création du personnage parce que le jeu plantait si votre nom était déjà utilisé. Dommage, parce qu'on pouvait bouger la caméra n'importe comment autour du modèle 3D pour regarder sa culotte de grand-mère.



Pour la postérité : "MMORPG médiéval générique n°52642, design anonyme de guerrière anorexique dépourvue de personnalité."



Pour coincer la caméra, il suffisait de tourner en rond. La vue à la troisième personne tournait moins lentement que le personnage, et après quelques instants, faisait face au personnage.



A la limite, certains décors étaient jolis, mais l'action était un bordel incompréhensible. Presque aucun sortilège n'avait de temps de rechargement. Les modes de jeu ? Deathmatch, Capture du Drapeau, et euh, c'est tout. Vraiment. 40 € en boutique et 10 € d'abonnement pour ça ? Aisément le pire jeu de l'année, et pourtant, on a eu notre dose de bouses vidéoludiques en cette année pourrie.